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Pour une ingénierie climatique planétaire

couverture Pour une ingénierie climatique planétaire
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Genre : Essais
Parution : 22 septembre 2015
PRIX public TTC : 18,2 €
PRIX Numérique public TTC : 11,99 €
Format : 140x210
Nombre de pages : 150
ISBN : 978-2-37233-021-3
ISBN Epub : 978-2-37233-022-0
David KEITH

Résumé :

David Keith, professeur à Harvard et l’un des rares spécialistes de ce sujet très controversé qu’est l’ingénierie climatique, nous propose sa vision – pessimiste – de la situation actuelle en matière d’action contre le changement climatique. Constatant l’inefficacité des approches reposant sur la seule réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), il prône une étude approfondie de la faisabilité et des conditions d’utilisation de technologies novatrices de réduction des effets de l’ensoleillement, par la dispersion dans la haute atmosphère de nanoparticules de dioxyde de soufre ayant pour effet de renvoyer dans l’espace, par réflexion, une partie des rayons qui nous proviennent du soleil. David Keith s’insurge également contre ceux qui récusent ne serait-ce que l’idée de pousser les feux de la recherche dans ce domaine pourtant – d’après lui – prometteur, et propose de remettre au centre du débat les questions de valeurs et de morale, que des considérations plus pratiques (effets sur la production alimentaire, sur la disponibilité en eau, opportunités économiques liées à la transition énergétique…), même légitimes, ne doivent toutefois pas occulter.

Après une introduction où il définit la géo-ingénierie et pose d’emblée les limites et les insuffisances de la gestion actuelle de la crise climatique, David Keith propose dans des termes compréhensibles une vue d’ensemble du dispositif – effet sur les rayonnements solaires et effets secondaires induits, description générale des mécanismes et des moyens mis en œuvre, complémentarité avec la réduction des émissions de GES, … – ainsi que les avantages distinctifs que cette technologie présente du fait de la quasi immédiateté de ses effets (Gérer l’ensoleillement de la planète, ch. 1). Revenant ensuite sur les risques liés au changement climatique, il insiste sur l’équation selon laquelle inertie + incertitude = danger (inertie des effets liés aux émissions de carbone, les émissions d’aujourd’hui continuant d’affecter le climat dans encore 1 000 ans, ou inertie de l’organisation économique, dont l’adaptation ne peut être que lente et progressive ; incertitude quant à l’amplitude, à la géographie et aux échéances de survenance des effets réels d’un réchauffement dont on ne connait pas précisément la « sensibilité » aux émissions de GES), et met en perspective l’insuccès des politiques de réduction des émissions de GES (Les risques climatiques, ch. 2). Revendiquant une approche scientifique des faits, il passe ensuite en revue les effets attendus, la question de leur suivi et de leur évaluation, ainsi que les risques associés à une telle ingénierie (Des faits : ce que nous dit la science, ch. 3), avant de proposer un scénario pour la conception et le déploiement du dispositif, scénario qu’il associe à une réflexion sur le rôle des responsables politiques, des opinions publiques et des scientifiques dans le développement et, le cas échéant, la mise en œuvre d’une telle technologie (Questions de technologie et de design, ch. 4). Explorant les enjeux éthiques et politiques, David Keith pointe ce qu’il considère être les contradictions des opposants à une recherche approfondie en matière de géo-ingénierie, notamment en ce que seul le recours à une telle technologie permettrait de réduire à relativement court terme les effets d’un réchauffement dont les régions et les populations les plus pauvres seront les premières à souffrir, et argumente pour une recherche au service de tous, prônant la restriction du droit à breveter lorsque les enjeux portent sur la gestion du patrimoine commun global (Considérations éthiques et politiques, ch. 5). Enfin, le dernier chapitre ouvre sur une analyse des raisons pour lesquelles les moteurs du changement ne s’allument pas, avec une tentative de remettre les valeurs au centre du débat, la mise en avant par les responsables politiques et institutionnels de seuls critères d’intérêt matériel et individuel n’étant pas pour Keith de nature à susciter chez les citoyens une réelle inflexion dans les comportements (Perspectives, ch. 6).

L’avis d’Antigone

David Keith nous l’assure dans sa préface : il propose dans ce livre une vue synoptique de la géo-ingénierie solaire à l’intention des non-spécialistes.

Certes.

Mais cette vue synoptique ne se limite pas aux dimensions « techniques » du sujet, fort bien expliquées, allant de la description du mécanisme de « renvoi » des rayons solaires dans l’espace à l’évaluation des effets potentiels et des éventuels risques d’une telle ingénierie, en passant par l’évocation de la puissance du dispositif – 1 tonne de matière réfléchissante permettrait de compenser pour moitié l’effet de réchauffement provoqué par l’émission d’1 million de tonnes de carbone – ou la présentation d’un possible scénario de développement et de mise en œuvre progressive.

Derrière ces considérations, perce en effet assez rapidement ce qui ressemble à une sourde colère, une révolte – qui finira en un terrible sentiment de désillusion.

Colère et révolte contre des opposants à la géo-ingénierie qui jettent l’anathème sur ceux qu’ils jugent être de dangereux apprentis-sorciers, et qui refusent, d‘après Keith, ne serait-ce que d’envisager que la communauté scientifique étudie de manière approfondie les bienfaits qu’un tel traitement novateur pourrait apporter à une Terre en péril, avec son atmosphère saturée et son climat vacillant – et alors même que l’unique remède qui lui est actuellement administré, la réduction des émissions de GES, se révèle d’une alarmante inefficacité. La Terre se réchauffe, et à une inquiétante vitesse ? Les émissions de GES continuent de plus belle ? Les premiers et les plus durement frappés par les effets d’un climat déréglé seront les plus pauvres ? Fi donc ! Balayons d’un revers de main l’éventualité que l’on puisse mettre au point une nouvelle technologie, permettant de réduire la chaleur reçue du soleil en même temps que l’on tenterait de réduire l’effet de serre par la limitation des émissions de carbone et autres GES, et revenons à la vie d’antan ! C’est ainsi que David Keith ressent la résistance des opposants à la géo-ingénierie, résistance dont il regrette qu’elle ne repose pas sur des arguments scientifiques et établis, mais sur des considérations partisanes et des a priori. Le choix se poserait-il en termes de tout-ou-rien – se lancer à corps perdu dans une mise en œuvre immédiate à grande échelle ou… renoncer – que David Keith n’hésiterait pas un instant : il renoncerait. Mais ce n’est pas là le choix qui s’offre à nous : le choix, c’est entre rester dans l’ignorance et renoncer, ou approfondir une recherche encore insuffisamment robuste, et se donner les moyens de décider – poursuivre ou renoncer – sur des bases solides, en connaissance de cause, et sans méconnaitre bien entendu qu’il existera toujours des marges d’incertitude qui ne pourront être levées – comme ne pourra jamais être levé le risque que les conséquences du réchauffement climatique lié au carbone s’avèrent en pratique bien plus désastreuses qu’envisagé. Et dans cette configuration, David Keith n’hésite pas davantage…

Désillusion également, envers un monde qui se détourne de la nature et, pour reprendre l’image de David Keith, tourne le dos, en avion, à la lumière du jour et au grandiose spectacle de la planète vue du ciel, pour mieux se concentrer sur les écrans des ordinateurs… Désillusion envers un monde qui ne transmet plus aux nouvelles générations l’amour, le goût, le respect de la nature, augurant d’un futur où, finalement, des arbres factices pourront bien border nos avenues sans que cela ne choque plus personne...

David Keith est un amoureux viscéral de la nature terrestre, et c’est pour cela qu’il veut tant la sauver, quitte à explorer, peut-être de manière paradoxale, de nouvelles voies, assurément novatrices et potentiellement périlleuses. Devant l’échec, ou du moins la cruelle insuffisance des actions de réduction des émissions de GES en cours, il considère avec amertume que ne pas explorer ces voies constituerait non seulement une grave erreur, incompréhensible d’un point de vue intellectuel et scientifique, mais aussi une faute envers l’humanité, faute qui serait imputable à une conception par trop égoïste et étroite d’une action publique qui ne sait plus parler au cœur des hommes, mais à leur seul ventre, ou à leur seul portefeuille, justifiant son vibrant appel à remettre les valeurs au centre du débat…




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